Infos sur le livre
éditions : Livre de poche (Albin Michel)
date de publication : 31-03-2021
pages : 236
prix : 7,40€
Résumé éditeur
1885 : comme chaque année, à la Salpêtrière, se tient le très mondain «
bal des folles ». Le temps d’une soirée, le Tout-Paris s’encanaille sur
des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en
colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires. Cette scène
joyeuse cache une réalité sordide : ce bal « costumé et dansant » n’est
rien d’autre qu’une des dernières expérimentations de Charcot, adepte de
l’exposition des fous. Dans ce livre terrible et puissant, Victoria
Mas choisit de suivre le destin de ces femmes victimes d’une société
masculine qui leur interdit toute déviance et les emprisonne. Parmi
elles, Geneviève, dévouée corps et âme au célèbre neurologue ; Louise,
abusée par son oncle ; Thérèse, une prostituée au grand cœur qui a eu le
tort de pousser son souteneur dans la Seine ; Eugénie enfin qui, parce
qu’elle dialogue avec les morts, est envoyée par son propre père croupir
entre les murs de ce qu’il faut bien appeler une prison.
Pourquoi ce livre ?
Depuis sa sortie, ce roman me faisait très envie à tous les niveaux. La parution au format poche était donc enfin l'occasion de le découvrir.
De quoi est-il question ?
Elles sont filles de joie, meurtrières, filles déchues ou simplement femmes avides de liberté... dans une époque qui ne tolère aucune place aux femmes dans la société si ce n'est celle d'être mères et épouses. Nous sommes en 1885, à Paris, et ces filles sont faites prisonnières dans un asile où elles sont déclarées folles, sans nul espoir d'en réchapper.
C'est l'époque où toute femme libre est décriée comme hystérique, où un psychiatre de renom, un dénommé Charcot, estime que le sexe de la femme est source de tensions, de malêtre et de désoeuvrement de la pensée mentale. Alors ces filles décrites comme telles sont faites prisonnières et sont amenées à subir les plus violentes expériences au nom de la science.*
Dans ce monde effroyable, Eugénie est une adolescente de bonne famille, un peu trop libre aux yeux de son père. Mais, surtout, capable de converser avec les morts comme elle le fait avec son grand-père parti trop tôt. Le dévoiler la catégorise d'emblée comme folle tendis qu'à la Salpétrière se prépare l'événement de l'année : le bal où les folles rencontres les hommes du monde.
Du côté de la forme...
La question de l'hystérie au 19ème siècle, je dois dire que j'en ai eu plus que mon compte lors de recherches universitaires. Pour autant, j'étais très curieuse de découvrir ce "bal" et la vie de ces femmes. Quelle claque !
Dans une époque qui considère que la femme ne doit être que soumise et sans pensée, toute exception se définie par la folie. Et l'auteure nous dévoile entre élégance et force les caractères de ces différentes femmes, toutes reléguées à la même enseigne. Eloignées du monde, elles nous touchent car ne sont finalement toutes que victimes de la violence de leur monde. Terrifiant.
Qu'elles soient les plus terribles meurtrières, de pauvres filles violées ou simplement de libres penseuses, elles doivent affronter les épreuves des expériences. Des expériences étudiées avec soin par l'auteure qui nous dévoile l'horreur et, tragiquement, les progrès de la médecine. De quoi porter un regard différent sur une époque marquante et passionnante.
Eugénie est un peu à part les autres par sa capacité de parler aux morts et est sans doute le personnage qui m'a le plus touchée. Car une femme née à la mauvaise époque. Etonnant le paralèle fait entre l'intelligence de ces femmes, l'horreur de l'asile et le caractère attractif, intrigué et voyeur que le lecteur peut repprocher au peuple tout en l'ayant lui-même.
Car si le bal lui-même n'aura lieu qu'à la fin du roman, tout le roman nous y prépare entre les préparatifs, les craintes et tout ce qu'il engage. Et il est vrai que le bal sonne comme hors du temps, comme décalé par rapport à l'horreur. Il sonne comme un moment d'évasion et de rêverie pour amuser un peuple et faire oublier leur réalité à ces femmes. Un moment beau et tragique à la fois.
Côté style, nous sommes là face à une écriture profondément littéraire, réfléchie, intelligente. Nous sommes face à des mots qui vous frappent, à des situations qui vous émeuvent et à une recherche historique en droit de nous impressionner véritablement. Nous sommes là face à un roman qui dénonce une époque tout en nous offrant une image forte et marquante de la femme. Incroyable.
En conclusion...
Voici un roman qui m'inspirait grandement et que je ne regrette pas du tout d'avoir ouvert. Les pages se tournent toutes seules et la dualité entre beauté et horreur est présente à chaque page. Le contexte historique est simplement parfait et la portée de réflexion pour le lecteur sans fin. Impossible de ressortir totalement indemne de ce roman.
Un coup de coeur qui change de tout ce que l'on connait en littérature.
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