jeudi 23 avril 2020

Au-delà de la lumière - Daniel Mat



Infos sur le livre

éditions : Scrineo
date de publication : 24-10-2019
pages : 480
prix : 17,90€

Résumé éditeur

Dans le futur, la réalité virtuelle a fait place aux rêves lucides partagés. Une version extrême de cette technologie, basée sur des expériences de mort imminente contrôlées, a donné naissance à la métamachie : un sport de combat opposant deux compétiteurs dans des arènes subconscientes, armés de leurs souvenirs manipulables à volonté. À dix-sept ans, David redoute cette discipline dont l'étoile montante n'est autre que Théa, sa petite amie. Plus sa carrière progresse, plus elle s'éloigne de lui. Tout bascule le jour où elle ne se réveille pas à la fin d'un combat. Alors que l'organisation étouffe l'affaire, David se retrouve seul et sans réponses. Lorsque l'opportunité de participer à un tournoi amateur s'offre à lui, il y voit une chance de mener l'enquête de l'intérieur. Mais ses propres souvenirs semblent se mettre en travers de son chemin. Jusqu'où est-il prêt à aller pour découvrir la vérité ?

Pourquoi ce livre ?

C'est lors du dernier salon de Montreuil  que je me suis laissée tenter par ce roman sous les conseils d'une autrice dont j'apprécie beaucoup le travail : Aurélie Wellenstein.

De quoi est-il question ?

Le monde a bien changé. Après avoir bien failli disparaître l'humanité s'est pourtant relevée et vit aujourd'hui au coeur de technologies démultipliées. L'une de ces technologies a mené à l'organisation de combats en réalité virtuelle : les rêves lucides partagés. Les participants s'y livrent donc des combats sans merci guidés par leurs souvenirs les plus forts.

Chaque jour, David, craint pour Théa. Fou amoureux de cette dernière, il la soutient autant qu'il voudrait la retenir. Jusqu'au jour où l'expérience de mort imminente dérape : Théa ne se réveille pas après son combat. David apprend alors à vivre avec les parents de son aimée, les aidant du mieux qu'il le peut. Mais Théa reste cachée quelque part et David est prêt à tout pour avoir des réponses.

Ces réponses, nul ne semble vouloir les lui donner jusq'au jour où une chance d'intégrer l'organisation des combats s'offre à David. Et s'il n'a jamais combattu, s'il n'est que très peu motivé par les défis eux-mêmes, il voit enfin là l'occasion d'avoir des réponses à ses questions au risque de mettre à mal toute l'organisation.

Du côté de la forme...

Je l'avoue, je ne me serais peut-être pas de moi-même retournée sur ce roman. Mais je suis une faible femme et je ne recule jamais devant un conseil livresque, surtout lorsque le conseil vise à découvrir un jeune auteur en train de percer.

Si je me suis tout de suite attachée à David et à l'amour qu'il porte à Théa, je dois bien dire qu'au début du roman je me suis demandée dans quel genre d'univers l'auteur voulait m'entraîner. Et je dois dire qu'entre les combats, les souvenirs et les morts contrôlées, j'ai eu départ eu un peu de mal à entrer dans l'histoire. Mais une fois tous ces éléments posés, l'histoire glisse toute seule.

Il est vrai que nous sommes là face à un roman très complet et assez complexe avec un univers très réfléchi et des codes un peu éloignés de ce dont on a l'habitude. Ici, il est question de technologies poussées à l'extrême. De quoi jouer avec notre monde d'aujourd'hui mais poussé à l'extrême dans un monde futuriste tellement plausible.

Au milieu de tout ça, David est un adolescent sans histoire, un adolescent qui va devenir exceptionnel non pas par la force du destin mais par amour pour Théa. De quoi refonder les codes du genre car rien ne prédestine David à sortir du lot si ce n'est son envie folle de découvrir les secrets de l'organisation, l'occasion pour l'auteur de basculer aux limites du thriller politique.

Et des secrets, autant dire qu'il y en a beaucoup et que l'auteur n'épargne pas ses personnages qui vont devoir faire preuve de courage, de patience et de force pour combattre une société battie autour de manipulations. Pourtant, David est aussi un personnage qui m'a agacée en ce qu'il est l'adolescent dans toute sa splendeur : égoïste, instinctif et impulsif. Réel mais agaçant pour moi.

Voici là un premier roman et le fait est que pour un premier roman l'auteur a travaillé son style avec soin pour aller vers un univers original et une intrigue troublante. Les codes sont là mais avec quelque chose de nouveau et dans une écriture où l'hypotypose est reine. Le style est complet et construit pour nous offrir un imaginaire frappant qui reste gravé en nous après la fin du roman.

En conclusion... 

Voici un roman que je me suis laissée conseiller et dont je ne savais trop qu'attendre mais qui, au final, a été une très belle surprise. Voici un roman qui reprend les codes de la dystopie avec un imaginaire fort et une intrigue prenante. Voici un roman qui fonctionne malgré quelques longueurs et réflexion politique originale et plus actuelle qu'on ne le croit.
Un nouvel auteur à découvrir et qui gagnera à être connu...

mardi 21 avril 2020

Toujours plus haut - Marie Kuhlmann



Infos sur le livre

éditions : Presses de la cité
date de publication : 28-03-2019
pages : 320
prix : 20€

Résumé éditeur

Près de Paris, de 1906 à 1914, les premiers pas de l'aéronautique, les exploits des pionniers Louis Blériot ou Santos-Dumont, vus à travers les yeux d'Aurélie. Avec eux et auprès de son père qui l'élève seul, la petite fille rêve d'exploits et d'aventures, toujours plus haut... C'est une plaie vive dans le coeur d'Aurélie : le dernier regard de sa mère sur le pas de la porte, valise à la main. A dix ans, la voici seule avec son père, Roland, et les souvenirs chéris de sa grand-mère issue d'une colonie d'Alsaciens installée en banlieue parisienne après 1872. Mécanicien des premières "machines volantes" de l'industriel Nieuport, Roland a été jusqu'alors un père absent, voire indifférent. Soudés dans l'épreuve, avides de rattraper le temps perdu, père et fille s'apprivoisent et tissent un lien de plus en plus fort. Après l'école, Aurélie rejoint les ateliers de Roland ; au fil des ans, elle partage sa passion. 

Pourquoi ce livre ?

Merci aux Presses de la cité grâce auxquelles j'ai pu découvrir ce roman d'une auteur que je n'avais encore jamais eu l'occasion de lire.

De quoi est-il question ?

Nous voici au début du XXème siècle. Après avoir vu un matin sa mère partir loin d'elle, l'abandonnant sans remord, la jeune Aurélie se retrouve seule avec son père. C'est alors une relation fusionnelle qui les unit, une relation qui mènera la fillette à aller faire un peu de secrétariat dans l'usine où travaille son père, une usine passionnée par les aéroplanes.

Dès lors, la fillette se passionne pour ces moyens de transport volants qui lui promettent de voir d'autres horizons et de grandes évasions. C'est dans cet univers de grandeur qu'elle apprendra à devenir une jeune fille puis une femme et trouve en Roland un oncle prêt à lui apprendre tout ce qu'il sait, y compris sur la vie.

Car dans le même temps, Aurélie devra apprendre à grandir sans mère, une mère qui lui manque plus qu'elle ne veut l'avouer. Elle devra apprendre à partager son père tout en se raccrochant à l'histoire de cette grand-mère libre qui parti des années plus tôt d'Alsace pour reconstruire une autre vie à Paris, une vie nourrie d'un secret qui pourrait tout changer pour Aurélie...

Du côté de la forme...

Si je lis des romans régionaux depuis des années, force est de constater qu'il est encore de temps à autres des auteurs que je ne connais pas et que je prends grand plaisir à découvrir pour m'immerger dans d'autres univers.

Comment ne pas être, dès le début du roman, très touchés par Aurélie, cette fillette qui va voir impuissante sa mère l'abandonner. Comment ne pas avoir envie de la prendre dans nos bras pour lui dire que tout ira bien tout en étant saisi d'incompréhension face à cette mère qui ne reparaîtra dans le roman que par des mots et des révélations troublantes...

Pourtant, cet abandon bien qu'étant vécu comme un drame est le signe d'une nouvelle vie pour Aurélie qui va alors beaucoup se rapprocher de son père. Et au sein d'une époque où le père est plus un chef qu'un être aimant, c'est une très belle relation privilégiée que le lecteur va voir naître ce qui tranche avec l'époque mais est aussi un vrai signe d'espoir.

Une renaissance en somme qui va aussi être les débuts de la passion, la passion pour une modernité que nous avons bien du mal à réaliser aujourd'hui. L'occasion pour l'auteure de nous parler longuement des "machines volantes". Et parce que ce roman est tiré de faits réels le lecteur est plongé dans une dualité de fiction et de document qui lui apprend beaucoup sur une époque pas si lointaine.

Mais ce roman, voyant grandir Aurélie, va aussi être pour l'auteure l'occasion de nous conter l'histoire d'une émancipation avec un petit goût de féminisme. Aurélie est une jeune fille en avance sur son temps tout en étant une fillette pleine de colère. Ainsi, le lecteur est plongé dans une histoire familiale bien plus contemporaine qu'on aurait pu le croire au départ.

Si nous sommes là face à un style sans vague et sans surprise, l'auteure sait nous prendre par la main pour suivre Aurélie et nous faire éprouver mille sentiments. Elle sait nous en apprendre beaucoup sur un sujet dont nous ignorons souvent tout mais sous le couvert de la fiction qui aurait peut-être parfois mérité plus de profondeur.

En conclusion... 

Voici un roman avec lequel j'ai passé un joli moment plein de douceur et d'amour, le genre de moment qui fait du bien tout en nous faisant voyager dans une autre époque et dans une machinerie que nous avons oublié. Voici un roman qui aurait mérité d'être davantage fouillé mais qui sait nous offrir une belle histoire de femme dans un monde en proie à la modernité.
Un roman à découvrir pour les amateurs qui me donne envie de retrouver l'auteure dans un autre roman. 

Le sorcier de la Maucroix - Roger Maudhuy

 

Infos sur le livre

éditions : De Borée
date de publication : 14-02-2019
pages : 238
prix : 19,90€

Résumé éditeur

Un beau jour, le paisible village de Pouilly-sur-Meuse voit arriver le jour de la Saint-Jean un homme à l'allure étrange portant des gants rouges. Ses yeux d'un vert sale, son peu de bagage et son argent attirent immédiatement la suspicion des rudes paysans du lieu. D'autant que Kreul, un allemand, compte bien s'installer ici alors qu'il n'y connait personne. Rapidement les conversations se focalisent sur cet homme qui veut même acheter une maison. Le maire, Anatole Leboeuf, est rapidement alerté de cette présence. Anatole vit avec sa belle-mère Léontine , un peu rebouteuse, un peu guérisseuse, et sa fille Yvonne, 30 ans qui ne trouve pas mari. Rapidement, Léontine est persuadée que Kreul est un sorcier qui fraye avec le diable et qu'il va s'en prendre à Yvonne qu'il faut donc marier de toute urgence avant qu'il ne s'en empare. Anatole est peu sensible à ses arguments mais voit malgré tout d'un mauvais œil la présence de Kreul. Il se passe des choses étranges, des objets disparaissent dans les maisons, et des morts étranges s'enchainent ...

Pourquoi ce livre ?

Merci aux éditions De Borée grâce auxquelles j'ai pu (re)découvrir ce roman d'un auteur dont j'avais bien envie de vous parler sur le blog.

De quoi est-il question ?

Dans ce petit village des Vosges, les habitants vivent en autarcie et n'apprécie guère que des étrangers viennent troubler leur tranquilité. Aussi, lorsqu'un homme, allemand de surcroix, décide de venir s'y installer, il n'est pas le bienvenue. Avec son accent et ses vêtements sales, il effraie les habitants et surtout ceux qui se nourrissent de croyances anciennes.

C'est notamment le cas de Léontine, une vieille femme du village, intimement convaincue que Kreul va apporter avec lui le malheur. Peut-être même serait-il sorcier et aurait-il pour but de nuire aux honnêtes gens. Car s'il lit une Bible incompréhensible, c'est bien qu'il pactise avec le diable. Il pourrait alors bien s'en prendre à Yvonne, vieille fille du village, fille de Léontine.

Et si Anatole, maire du village, ne souhaite pas se laisser dévorer l'esprit par toutes ces légendes, si son instinct le pousse à aller vers l'allemand, il doit bien s'avouer que depuis l'arrivée de Kreul d'étranges événements se produisent au village, des événements qui ne sont pas pour rassurer. Alors, lorsque la mort commence à s'inviter, Anatole est pris à parti et se doit d'agir...

Du côté de la forme...

Ce roman, j'avais eu la chance de le lire à l'état de manuscrit. J'ai donc eu un grand plaisir à le relire afin de vous en parler et dirais même que j'y ai pris plus de plaisir encore lors de cette relecture qui a su me plonger dans un univers comme je les aime.

L'auteur est spécialiste de contes et légendes et cela se ressent dans ce roman où la majorité des personnages sont nourris de ces croyances anciennes. L'occasion pour l'auteur d'en glisser quelques unes au fil des pages ce qui est plutôt agréable. Car les légendes des Vosges étant des légendes que je connais moins, ce livre est assez instructeur là-dessus.

Mais, pour autant, nous sommes là dans un roman à part entière avec une intrigue prenante. Car si le lecteur se sent plus éveillé que les personnages, il en vient aussi à s'interroger sur Kreul, se demandant qui est cet homme qui semble avoir bien des secrets. L'occasion pour l'auteur de nous mener dans des secrets de familles qui vont se développer au fil des pages.

Nous sommes ici plongés dans un petit village et donc dans une ambiance régionale comme on peut les aimer dans les romans du genre. C'est d'ailleurs là pour le lecteur le moment de s'imprégner d'une région qu'il connaît peut-être moins avec un cadre assez enchanteur qu'il prend envie d'aller voir de ses propres yeux. Car ce roman est un voyage percutant dans les Vosges.

Se présentant comme une intrigue au sens propre, ce roman invite aussi à une enquête autour de morts mystérieuses tout au long du roman, de quoi mêler l'étranger à une histoire plus large. Et si le lecteur n'est pas dupe, il s'interroge malgré tout, se laissant prendre dans la dualité des légendes et de la modernité. Jusqu'à des révélations étonnantes.

Côté style, l'auteur sait mêler une intrigue fouillée aux légendes qu'il connaît bien et sait embarquer son lecteur au coeur d'un village à la fois touchant et agaçant. De même, il sait jouer sur les codes de la littérature car Kreul n'a pas été sans me faire penser à Etienne Lantier : un homme qui survient de nulle part et chamboule des vies bien rangées sans vraiment s'en rendre compte.

En conclusion... 

Voici un roman que j'ai pris plaisir à relire et qui devrait plaire aux amateurs du genre, surtout aux amateurs de contes et légendes qui font partie d'un patrimoine que nous avons parfois tendance à oublier. Voici un roman qui dénonce l'intolérance et les esprits étriqués au sein d'une intrigue prenante et d'histoires de famille comme on les aime.
Un roman intéressant et plutôt prenant qui change du régionalisme tel qu'on l'entend d'ordinaire.

Les filles de Roanoke - Amy Engel



Infos sur le livre

éditions : J'ai lu
date de publication : 03-10-2018
pages : 379
prix : 8€

Résumé éditeur

 Après le suicide de sa mère, Lane, 16 ans, est confiée à la garde de grands-parents dont elle ignorait l'existence. À son arrivée au domaine des Roanoke sous la chaleur étouffante du Kansas, au milieu des champs de blés, elle est à la fois fascinée et troublée. Car il plane sur le royaume des Roanoke une atmosphère morbide : toutes les filles de la lignée ont connu des fins tragiques. Quand la cousine de Lane disparaît dix ans plus tard, la jeune femme se lance à sa recherche, sans se douter un seul instant qu'elle va déterrer le plus terrible des secrets de famille. Dans ce roman d'une noirceur magistrale, Amy Engel distille avec talent le poison des non-dits. 

Pourquoi ce livre ?

Merci aux éditions J'ai lu grâce auxquelles j'ai pu découvrir ce roman "thriller" d'une auteure que j'apprécie beaucoup, un roman très tentant.

De quoi est-il question ?

Lane n'est qu'une adolescente lorsqu'elle perd sa mère, une femme fragile qui aura fini par se suicider, et se retrouve seule au monde. Elle est alors reccueillie par ses grands-parents au domaine de Roanoke, une demeure familiale dont sa mère ne lui avait jamais parlé et qui ne semble pas lui réserver le meilleur des accueils, un manoir qui semble cacher le secret du passé de cette mère.

Pourtant, peu à peu, Lane se fait à cette nouvelle vie et se rapproche notamment de sa cousine Allegra qui lui redonne goût à la vie. Mais un jour, Lane décide de fuir et de gagner son indépendance sans se douter que, des années plus tard, elle devra retourner à Roanoke, bien malgré elle, pour aider ses grands-parents à retrouver cette cousine qui aurait étrangement disparu.

Bien qu'hésitante, Lane décide de franchir le pas. Car si retrouver le domaine est loin de la réjouir, elle est désormais une adulte, une adulte bien décidée à percer le secret de cette grande maison et peut-être même le secret de sa propre histoire. Ce qu'elle découvrira dépassera pourtant tout ce qu'elle pouvait imaginer.

Du côté de la forme...

Ayant découvert l'auteure dans un genre plus jeunesse et fantastique avec The book of Ivy que j'avais adoré, j'étais plus que curieuse de pouvoir découvrir ce roman plus "adulte" et plus axé "thriller" avec des secrets de famille comme je les aime.

Le roman se présente dans une alternance entre le passé et le présent. Ainsi, le lecteur se plonge tour à tour dans le passé d'une adolescente troublée et dans le présent d'une jeune femme prête à tout pour avancer dans la vie et découvrir des secrets cachés. Une dualité efficace qui nous rend Lane d'autant plus attachante et le domaine d'autant plus dérangeant.

Car le domaine se présente, comme souvent, comme un personnage à part entière du roman avec des murs qui ont des oreilles et un cadre qui respire le secret. L'ensemble se présente donc comme un huis-clos étonnant où l'angoisse va cohabiter avec des romances en éveil qui font du bien dans une intirgue lourde, à moins que...

Le passé de Lane nous invite à voir une adolescente grandir et s'émanciper comme elle le peut alors que le présent est axé sur la disparition d'Allegra. Et si le lecteur, qui n'est pas dupe, comprend que tout est lié d'une manière ou d'une autre, il est bien loin de s'imaginer les surprises que lui réserve l'auteure et les dévoilements de l'intrigue.

Ce roman joue avec différents codes, du thriller à la romance en passant par les secrets et l'insouciance de l'adolescence. Cela aurait pu donner un sentiment de "foure-tout" et pourtant il n'en est rien car tout s'imbrique parfaitement pour un ensemble crédible et une histoire de famille qui vaut largement les plus grandes sagas du genre.

Si cette fois l'auteure reste dans une écriture très réaliste où l'imaginaire n'a pas sa place, elle sait mêler à son écriture une ambiance irréelle et troublante où la magie semble pouvoir surgir à chaque instant. Elle sait nous offrir une héroïne à la fois forte et troublante où le manichéisme n'est qu'illusion et où l'horreur du réel dépasse l'imaginaire possible.

En conclusion... 

Voici un roman qui me faisait très envie et qui a su m'embarquer dans un huis-clos comme je les aime où le lecteur ne peut avoir confiance en personne. Voici un roman qui nous offre un cadre à la fois enchanteur et terrifiant avec des personnages forts et une intrigue envoûtante à la fois classique et efficace où la romance permet de souffler un peu.
Un roman à découvrir pour une auteure dont je lirai bien sûr les prochains romans. 

Lectio Letalis - Laurent Philipparie

 

Infos sur le livre

éditions : Belfond
date de publication : 17-01-2019
pages : 368
prix : 19,90€

Résumé éditeur

Oserez-vous tourner les premières pages du LECTIO LETALIS ? Paris. Un assistant d'édition tout juste embauché se tranche les veines à la lecture du premier manuscrit qui lui est confié. C'est la troisième fois, en quelques semaines, que le même scénario-suicide se produit dans cette maison d'édition. Bordeaux. Le lieutenant Gabriel Barrias, ancien indic devenu flic, enquête sur l'assassinat atypique d'un psychiatre massacré par un rapace, dans son cabinet, en pleine consultation. Deux affaires éloignées en tout point, et pourtant. Un nom apparaît des deux côtés. Celui d'Anna Jeanson, qui fut, dix ans plus tôt, l'unique survivante d'un suicide collectif survenu dans une secte dressant des animaux à tuer. 

Pourquoi ce livre ?

Merci aux éditions Belfond grâce auxquelles j'ai pu découvrir ce roman d'un auteur que je n'avais jamais lu et dont le résumé m'intriguait beaucoup.

De quoi est-il question ?

En 2013, à Paris, Alexandre est un jeune homme comblé. Après des années d'études, il touche enfin son rêve du doigt : entrer dans le monde de l'édition. Alors, lorsqu'il est embauché comme assistant d'édition chez Paul Gerber et qu'il se voit confier un premier manuscrit à retravailler, il espère bien de pas se tromper. Mais après une centaine de pages lues, il se suicide. Il est le troisième.

Une enquête est ouverte car l'enquêteur Nils Tiéno soupçonne une affaire plus lourde qu'il n'y paraît tendis que, dans le même temps, à Bordeaux, une jeune femme est recherchée par la police. Malade mentale, elle aurait tué son psychiatre 10 ans après avoir échappé au suicide collectif d'une secte secrète. Car le psychiatre aurait été attaqué par un rapace, signature de la secte.

La secte dissoute se serait-elle reformée ? Que cache la jeune Anna ? Et surtout, quel rapport avec ce manuscrit meurtrier qui interroge les enquêteurs ? Car tout porte à croire que tout est lié et qu'une organisation semble bien décidée à faire valoir ses croyances au monde en usant de méthodes peu conventionnelles qui pourraient mettre à mal les services de police...

Du côté de la forme...

Ayant vu passer pas mal de retours sur ce roman, j'avais très envie de m'en faire ma propre idée et de découvrir un auteur qui semblait prometteur. Etant dans une période où j'ai envie de lire des bons polars, l'occasion était rêvée.

Voilà le lecteur plongé dans le monde de l'édition. Un univers assez obscur en général que l'auteur nous invite à découvrir ici même s'il ne s'agit que d'un survol. C'est ainsi qu'il joue sur l'idée du "manuscrit qui vous possède" puisqu'ici, au sens propre, ce manuscrit semble pousser ses lecteurs à se suicider. Un principe d'envoûtement poussé à son paroxysme comme clin d'oeil au lecteur passionné. 

La mise en abyme du livre qui vous envoûte est parfaite. Alors que le roman présente un manuscrit qui manipule ses lecteurs le roman même vous embarque avec cette sensation que l'on adore dans le polar : l'impossibilité de lâcher le livre avant de l'avoir terminer. Une dualité qui fonctionne et que l'auteur mène avec talent.

Le lecteur se balade ici entre Paris et Bordeaux mais est aussi embarqué dans un univers qui passionne autant qu'il effraie : le monde des sectes. Et il convient de constater que c'est avec brio que l'auteur nous décrit cet univers perturbant. Car si le lecteur peut avoir envie de juger les adeptes, il comprends vite qu'il peut lui-même être manipulé.

L'enquête elle-même est bien menée avec des rebondissements percutants et même si on retrouve dans ce roman les codes du flic troublé qui se raccroche à son travail ou les personnages qui sont pas ce que l'on croit, le fait est que cela fonctionne. D'autant que si crimes il y a, ce n'est pas là l'essentiel du roman qui joue plutôt sur une psychologie des plus étonnantes.

Je n'avais jamais lu de romans de l'auteur et je suis plutôt contente d'avoir découvert un nouveau "flic écrivain" qui sait mêler ce qu'il connaît à une fiction forte. Et si ce roman aurait peut-être mérité plus de profondeur parfois, notamment dans l'emprise sur les adeptes, l'ensemble vous fait frémir jusqu'à un final retentissement et un monde de l'édition que vous ne verrez plus comme avant.

En conclusion... 

Voici un roman qui me tentait beaucoup et que je suis plus que ravie d'avoir pu découvrir pour pouvoir me plonger dans un univers qui fait trembler. L'auteur a su jouer sur les codes du polar pour faire basculer la vision que l'on a des manuscrits non publiés tout comme il a su m'offrir un vrai moment d'intrigue comme je les aime.
Un roman à découvrir pour les amatuers et un auteur à suivre... 

dimanche 19 avril 2020

Bleu, Blanc, Sang, 2 - Bertrand Puard



Infos sur le livre

éditions : Hachette
date de publication : 12-10-2016
pages : 312
prix : 16,90€

Résumé éditeur

Eva Brunante a promis au patriarche de la riche et puissante famille Tourre de l’aider à retrouver les cinq toiles de Justine Latour-Maupaz encore dispersées à travers le monde et dont on ignore tout. À la clef, ni plus ni moins que la survie de l’empire Tourre. Car une seule œuvre sur les douze de l’artiste est à même de sauver la vie de Clarissa, la petite-fille du patriarche, atteinte d’une maladie orpheline. Mais chaque seconde compte car en plus de l’état critique de Clarissa, son oncle, qui vient de conquérir l’Élysée, se lance lui-aussi dans la bataille pour priver sa nièce du remède et rafler l’intégralité de l’empire. La quête des tableaux manquants de l’artiste fait entrer Eva dans une saga familiale haletante, traversée d’amours intenses et de haines féroces. Une quête qui poussera Eva à assumer son rôle, se révélant plein de ressources insoupçonnées, et à faire éclater la vérité contre ces hommes de pouvoir n’hésitant pas à salir la République dans le but de servir leur seul intérêt.

Pourquoi ce livre ?

Après une lecture convainquante du premier volet de cette saga, c'est avec avidité que je me suis plongée dans la suite pour aller plus loin dans cette aventure, une fois le secret dévoilé.

De quoi est-il question ?

Bien malgré elle, Eva vient de comprendre qu'elle est désormais étroitement liée avec la famille Tourre, la famille présidentielle française riche et puissante. Mais la richesse ne faisant pas tout, elle est aussi désormais la seule à pouvoir mettre la main sur les tableaux de Justine Latour-Maupaz, une artiste de l'époque révolutionnaire qui aurait peint une toile de son sang.

En effet, le sang de cette toile contiendrait l'anticorps susceptible de sauver Clarissa, petite fille de Tourre, victime d'une maladie rare qui la condamne. Pour Eva, sa soeur et leurs nouveaux amis, une quête s'annonce pour retrouver tous les tableaux de l'artiste. Mais d'autres veulent aussi mettre la main sur ces oeuvres alors que beaucoup ne semble pas à même de répondre aux questions d'Eva.

Commence alors une aventure aux quatre coins de France et de l'Europe pour retrouver les tableaux, des tableaux bien cachés et oubliés qui reprennent les 12 travaux d'Hercule. De quoi interroger Eva qui voit dans l'histoire de l'artiste l'histoire de son oeuvre, une histoire qui ressemble étrangement à la sienne sur bien des points...

Du côté de la forme...

Après avoir passé un superbe moment avec le premier volet de cette trilogie et après une fin plus que déceptive, j'avais hâte de retrouver Eva et de poursuivre cette aventure pour en savoir plus et pour savoir comment tout cela allait tourner. Je n'ai pas été déçue.

Avec ce tome, nous retrouvons les personnages là où nous les avons laissés. Eva vient de découvrir la vérité sur la petite Clarissa et la quête aux tableaux perdus n'a jamais été aussi proche. Une manière pour l'auteur de ne rien laisser perdre à son lecteur alors même qu'il revient un peu en arrière en cas de lecture espacée. De quoi poursuivre sur les chapeaux de roue sans être perdu.

Si le premier volet était surtout un tome de mise en place où le secret avait toute sa place et le mystère au coeur de tout, l'idée ici est d'axer davantage ce tome sur l'aventure et sur l'enquête même pour comprendre qui était l'artiste et où sont les tableaux. De quoi mêler art et polar et d'accentuer le suspens avec des opposants prêts à tout. L'occasion aussi d'en apprendre plus sur l'artiste centrale.

Mais si de nombreuses réponses sont données ici, l'auteur profite de ce volet pour poser d'autres questions et laisser son lecteur interrogatif par rapport à Eva qui, si elle est toujours aussi attachante et forte, semble être aussi la clé à beaucoup de questions. De quoi aussi lier le passé et le présent mais sans trop en dire.

Ce tome est enfin l'occasion de considérer Justine comme un personnage à part entière et plus seulement comme une entité lointaine servant l'intrigue. On la découvre en tant que femme et en tant qu'artiste avec l'envie de plonger dans son époque pour découvrir ses secrets. L'occasion aussi de la lier avec de nouveaux personnages dans la quête de la vérité.

Une fois encore, je me suis laissée porter par le style de l'auteur qui sait tout inclure dans un roman pourtant efficace et rapide. Un parfait style de polar pour ados, une aventure à rebondissements où il ne manque rien et des personnages forts que l'on a du mal à quitter. Une occasion aussi de mieux comprendre l'art et les secrets de la politique malheureusement trop réels.

En conclusion... 

J'avais hâte de pouvoir poursuivre cette aventure et je n'ai pas été déçue avec une intrigue qui ne m'a pas lâchée. J'ai aimé, avec Eva, partir en quête des tableaux. J'ai aimé en apprendre plus sur Justine et j'ai aimé m'angoisser face à l'attitude des opposants. Enfin, j'ai aimé dans ce tome la manière dont l'auteur sait répondre à des questions tout en en posant d'autres.
Il va de soi que je ne vais pas traîner pour lire le troisième et ultime tome de la série. 

Le violon d'or - Albert Ducloz



Infos sur le livre

éditions : De Borée
date de publication : 02-03-2012
pages : 352
prix : 18€

Résumé éditeur

Après avoir perdu sa femme dans un accident, laissant une trace indélébile au sein de la famille, Philippe élève ses quatre enfants avec l'aide de sa mère Mathilde. Pourtant, quand il rencontre Juliette, la jeune institutrice du village, au sujet des talents de sa fille Nathalie pour le violon, le charme opère. Ils décident alors de se marier. Quelle sera la réaction des enfants de Philippe face à cette nouvelle ? L'idylle va bientôt être rattrapée par des secrets familiaux inattendus...

Pourquoi ce livre ?

Acheté il y a bien longtemps en librairie pour ma maman, ce roman était depuis dans sa bibliothèque sans que je ne trouve le temps de le lire. Quelle joie d'avoir enfin pu y remédier !

De quoi est-il question ?

Au coeur de la Haute-Loire, dans les années 1960, la vie oscille entre tradition et modernité. C'est là que Juliette est mutée pour devenir institutrice d'une classe unique, trouvant auprès de ses élèves un réconfort après la séparation de ses parents qui l'a durement marquée. Et le soir, avant l'heure de la sortie, elle prend plaisir à sortir son violon pour jouer à sa tribu quelques airs de musique.

Au sein de cette classe unique, Nathalie. La fillette, portant le poids de la mort de sa mère quelques années plus tôt, se passionne pour la musique et pour le son du violon que Juliette s'engage bientôt à lui apprendre. L'occasion pour la fillette de s'éveiller au monde tout en se découvrant un talent et une passion sans faille qui nourri désormais l'ensemble de ses journées.

Ces leçons improvisées vont être l'occasion pour Juliette de faire la rencontre de Philippe, le père de Nathalie. Veuf, il se consacre aujourd'hui à sa ferme et à ses enfants. Sa rencontre avec Juliette sera pour lui l'occasion de renouer avec l'amour et la joie de vivre. Mais cette relation naissante fera bientôt ressurgir de lourds secrets de famille qui n'auraient jamais dû reparaître.

Du côté de la forme...

Albert Ducloz est, vous le savez, un auteur que je suis depuis longtemps mais dont, je l'avoue certains romans sont parfois passés entre les mailles. Découvrir de temps à autres ses anciens titres me permet donc de combler ces failles et ce roman-ci, en particulier, me faisait de l'oeil depuis des années.

La musique... sans doute l'art que j'affectionne le plus après celui de la littérature. Etant issue d'une famille de musiciens, c'est bien normal me direz-vous. Et si la musique classique n'est pas le genre que j'affectionne le plus, j'ai pris beaucoup de plaisir dans ce roman à suivre Nathalie et sa rencontre avec son instrument. Car c'est bien là d'une rencontre qu'il s'agit, une rencontre à vie.

Si j'aurais apprécié que le violon soit encore davantage présent au fil des pages, il convient de constater que sa présence est justement dosée pour une personne ayant à coeur de lire une intrigue au-delà de l'histoire de Nathalie. Pour ma part, si une histoire entièrement centrée autour de l'apprentissage du violon m'aurait bien plue, le secret de famille lié au couple a su me séduire.

Car au-delà de la rencontre avec le violon, ce roman se présente comme une histoire de famille étonnante pour l'époque : l'histoire d'une famille recomposée. De quoi mettre en avant le rapprochement de Juliette avec les enfants mais de quoi, également, servir un secret comme on peut les aimer dans ce type de romans.

Ce roman nous mène au coeur de la Haute-Loire et l'auteur sait prendre son lecteur par la main pour l'inviter à découvrir La Chaise-Dieu, Le Puy et tous ces petits villages du Velay propices aux belles histoires. Et comme il est toujours appréciable de reconnaître des régions, les amateurs du genre sauront apprécier.

Côté écriture, c'est une nouvelle fois sans difficulté que l'auteur nous entraîne dans l'intrigue qu'il nous propose. Il sait mêler le réel à la fiction en nous offrant un apprentissage succint du violon tout en nous plongeant au coeur d'une famille que l'on va voir évoluer. Il sait aussi nous toucher par des personnages "vrais" et "imparfaits" que l'on voit tout tenter pour gagner leur bonheur.

En conclusion... 

Voici un roman que j'attendais de trouver le temps de lire depuis très longtemps et j'ai pris très grand plaisir à découvrir. Voici un roman qui parle de musique et de famille, d'une plongée dans une passion et d'un retour sur des secrets. Voici un roman qui regarde vers l'avenir et vers les joies simples pour se défaire des souffrances du passé.
Un magnifique roman de l'auteur que je vous invite très vivement à découvrir en attendant un inédit... 

samedi 18 avril 2020

Les Collisions - Joanne Richoux



Infos sur le livre

éditions : Sarbacane
date de publication : 04-04-2018
pages : 252
prix : 15,50€

Résumé éditeur

Gabriel et Laetitia entrent en Terminale Littéraire. Il est brumeux et arrogant. Elle est fière et sauvage. Ils s'ennuient royalement au lycée, et ils ont comme une envie de le faire payer à tout le monde. Ca tombe bien : cette année, ils étudient Les Liaisons dangereuses. Ca va leur donner des idées...

Pourquoi ce livre ?

C'est après avoir pas mal parlé de ce roman avec l'autrice que je me suis laissée tenter, lors du dernier salon de Montreuil et suis ravie d'avoir enfin pu le sortir de ma pal.

De quoi est-il question ?

Gabriel et Laetitia ont 17 ans. Elèves de terminale le premier ne vit que pour se faire remarquer en cours, la seconde est en colère contre le monde entier. C'est dans le malheur qu'ils se sont trouvés, un malheur qui les pousse à la destruction. Alors, lorsque leur professeur de littérature leur annonce qu'ils étudieront cette année Les liaisons dangereuses, l'idée de réécrire le roman à l'échelle de leur classe va comme allant de soi. 

Chaque rôle est alors redistribué : de l'innocente Cécile au jeune Danceny, de la prude présidente de Tourvel au libertin Gercourt. Et, bien sûr, eux deux dans les rôles de Merteuil et Valmont pour mener tout ce petit monde à sa perte. Et si le jeu est dangereux, Laetitia et Gabriel voit là l'occasion de faire souffrir autant qu'ils souffrent. 

A l'instar du roman, un jeu malsain va voir le jour, un jeu où les ressemblances avec le classique se seront pas sans conséquences. Car Gabriel et Laetitia cachant leurs souffrances derrière leur cruauté pourraient bien, bientôt, tout voir leur exploser à la figure, le jeu prenant des proportions qu'ils n'auraient pas imaginer et qui pourraient dépasser la maîtrise de deux adolescents...

Du côté de la forme...

S'il est un classique de la littérature classique que j'affection plus que tout, c'est ce roman de Laclos qui, à mon sens, est juste parfait. Alors, une autrice aimant ce roman autant que moi et choisissant de le réécriture dans un cadre de lycée, je ne pouvais pas passer à côté.

Le principe même de réécriture est un principe que j'apprécie énormément car il est porteur d'un travail conséquent et, le plus souvent, au plus proche du texte d'origine. Ici, l'autrice sait parfaitement trouver un juste milieu entre une réécriture au plus proche du roman de Laclos et un roman inédit à part entière tout à fait lisible sans avoir lu le classique.

Gabriel et Laetitia sont typiquement ce genre d'ados intelligents qui se servent de leur tête à mauvais escient. Le genre d'ados à qui on rêve d'en coller une et qui pourtant nous touchent quand on réalise la vie qu'ils mènent au quotidien. Pour autant, j'ai aussi eu le sentiment d'une certaine complaisance de leur part à jouer de leur malheur pour faire souffrir l'autre ce qui a ralenti mon empathie à leur égard.

Si la réécriture est bien présente, ce roman est aussi une manière pour l'autrice de dévoiler la face cachée du lycée, ce monde sans merci où tout est régit comme une mini-société où chacun de débât comme il le peut et où les jeux de pouvoir surgissent dans chaque couloir. Une manière aussi de montrer que les caractères individuels n'ont que guère changé depuis le 18ème siècle.

Et puis, ce qui ne devait être qu'un jeu va basculer et entraîner les personnages dans des situations trop lourdes à porter pour eux. Un retournement que l'on attend, et même que l'on espère. Un retournement qui entraîne le lecteur dans un cercle de folie, au sens propre du terme, dans une bascule de l'esprit jusqu'au point de non retour.

Côté style, j'ai été ravie de retrouver l'écriture si vive et si forte de l'autrice même si le style est bien différent de celui que je lui connaissais dans Désaccordée. Ici, elle sait inviter son lecteur dans la passion des Liaisons dangereuses et sait le propulser dans une ambiance lycée peut-être plus effrayante encore quand la folie de la jeunesse se mêle au désir de détruire.

En conclusion... 

Voici un roman qui me faisait pas mal envie depuis pas mal de temps et avec j'ai passé un délicieux moment plein de fureur et de réflexion. Voici un roman intelligent qui parle des jeunes en perdition et qui nous invite dans un monde de violence que nous avons bien du mal à imaginer, dans des esprits perturbés qui laissent entendre toute la violence visibles chez les jeunes.
Un nouveau roman coup de coeur grâce à une autrice que je vous invite vivement à découvrir. 

vendredi 17 avril 2020

Le retour de Fanny - Joseph Farnel



Infos sur le livre

éditions : De Borée
date de publication : 12-03-2020
pages : 286
prix : 19,90€

Résumé éditeur

1942, Rafle du Vel d'Hiv. Alors que sa famille est embarquée, Fanny Goldberg parvient à se cacher et à atteindre la zone libre où elle est accueillie par des Résistants, Pierre et son épouse Simone. Avec leur aide, elle change d'identité et devient Fannie Madur, une cousine couturière. A la Libération, Fanny remonte à Paris où elle ouvre une maison de couture de renommée mondiale. Mais après une vie bien remplie, elle quitte tout et retourne rejoindre les siens dans cette campagne qui lui rappelle tant de souvenirs et où elle avait trouvé le repos et une famille...

Pourquoi ce livre ?

Merci aux éditions De Borée grâce auxquelles j'ai pu découvrir ce nouveau roman d'un auteur que je suis depuis quelques années avec toujours le même plaisir.

De quoi est-il question ?

Paris, juillet 1942. Fanny, une jeune juive parisienne échappe de justesse à une rafle, celle du Vel d'Hiv. Désespérée et inquiète pour ses parents, elle se laisse pourtant conduire par des voisins et de parfaits inconnus pour fuir la zone occupée et rejoindre la ville de Brive, en zone libre, où elle peut espérer survivre. 

C'est dans une petite ferme de Corrèze que Pierre et son épouse Simone vont prendre le risque de la cacher, changeant son identité et la faisant passer aux yeux de tous pour leur nièce orpheline. Et si Fanny va au départ avoir un peu de mal à cacher ses origines, elle va très vite devenir un membre à part entière de cette famille entrée en Résistance.

Mais bientôt, un jeune garçon arrive à la ferme. David, victime lui aussi de l'horreur est venu en zone libre pour se battre. Et entre les jeunes gens, l'amitié va bientôt laisser place à un sentiment plus puissant alors même qu'au village les commérages vont bon train entre de vieilles femmes avides de rumeurs et des hommes entrés en collaboration...

Du côté de la forme...

Vous le savez, les histoires de terroir au coeur de la seconde guerre sont toujours des histoires que j'apprécie et qui me touchent. Et si l'inédit est bien difficile dans ces thématiques, ces romans sont toujours efficaces et essentiels.

Fanny est une jeune femme qui m'a beaucoup touchée de bout en bout du roman car elle est un symbôle. Un symbôle de l'horreur vécue, un symbôle de courage mais aussi un symbôle de vie avec ses sentiments qui s'éveillent et sa force d'avancer et de s'essayer au bonheur au coeur d'une époque troublée. Car, sans oublier l'horreur, elle vivra heureuse sur bien des points et cela donne à réfléchir.

L'auteur nous plonge donc au coeur de cette époque trouble de la guerre en nous mettant face à ces différentes facettes : les rafles, la Résistance, la Collaboration mais aussi les comportements d'hommes et de femmes au milieu de tout ça qui ne savent trop comment se placer pour juste espérer vivre. Un tableau complet mais où la volonté de protéger autrui dépasse le reste.

Bien sûr, nous pourrions dire que ce roman n'apporte pas beaucoup de nouveauté dans un genre déjà rebattu mais il sait nous offrir un florilège de personnages forts et vrais qui redonnent espoir en l'âme humaine. D'ailleurs, la romance et l'amour familial sont au centre de tout et rappelle que la famille n'est pas seulement celle de sang.

Et puis, ce roman est aussi une plongée dans une profession chère l'auteur : le monde de la couture et des tissus. Et si cet aspect n'est pas surdéveloppé dans le roman il fait partie des aspects qui font du bien et qui, surtout, font avancer l'intrigue. Fanny est une couturière hors pair et c'est sa passion pour cet univers qui ressort au-delà de l'horreur du dehors. De quoi en apprendre plus sur ce monde.

C'est avec un immense plaisir que j'ai retrouvé le style de l'auteur qui sait raconter les histoires et sait nous amener avec lui dans des histoires de vies fortes. Le cadre est là, le terroir de la Corrèze est bien présent et, surtout, l'émotion ressort à chaque page et jusqu'à la fin du roman qui nous amène vers d'autres problématiques où le lien vers l'autre est toujours essentiel.

En conclusion... 

Voici un roman qui s'engage dans un genre certes rebattu mais qui est toujours aussi efficace avec des héros de l'ordinaire. Voici un roman qui nous laisse suivre la vie d'une jeune femme que l'on admire tout en voulant la prendre dans nos bras. Voici un roman qui nous emmène dans le monde de la couture, couture au sens propre et couture des relations humaines.
Un très beau roman à découvrir pour les amateurs du genre. 

jeudi 16 avril 2020

Territoires - Olivier Norek



Infos sur le livre

éditions : Pocket
date de publication : 08-10-2015
pages : 384
prix : 7,60€

Résumé éditeur

À Malceny, dans le 93, on est habitués aux règlements de comptes. Mais un nouveau prédateur est arrivé en ville et, en quelques jours, les trois plus gros caïds du territoire sont exécutés. Le capitaine Coste et son équipe vont devoir agir vite, car leur nouvel ennemi s'implante comme un virus dans cette ville laissée à l'abandon, qui n'attend qu'un gramme de poudre pour exploser. Une ville où chacun a dû s'adapter pour survivre : des milices occultes surentraînées, des petits retraités dont on devrait se méfier, d'inquiétants criminels de 12 ans, des politiciens aveugles mais consentants, des braqueurs audacieux, des émeutiers que l'État contrôle à distance de drone. Et pendant ce temps, doucement, brûle la ville. La dernière affaire du capitaine Coste ? Elle se passe en enfer...

Pourquoi ce livre ?

Olivier Norek fait, depuis quelques années, partie de mes auteurs favoris. Pourtant, pour une raison obscure, ses premiers romans seront restés dans ma pal. Je vais y remédier.

De quoi est-il question ?

Nous voici dans le 93, département de la banlieue parisienne bien connu pour sa misère, ses traffics en tous genres et son impopularité. Alors, quand des caïds de la régions connus pour leur participation active dans le marché de la drogue sont exécutés, nul n'est vraiment surpris. Pourtant, il faut bien mener l'enquête et c'est le capitaine Coste qui s'y colle.

De nouveau, le capitaine va donc devoir se confronter aux jeunes qui n'ont aucune envie de voir la police s'occuper de leurs affaires. D'autant que cette fois, ce sont des citoyens sans histoire qui vont être mêlés à l'enquête. Car dans les banlieues chacun survit comme il le peut, que ce soient les jeunes adolescents qui ne voient plus d'intérêt à l'école ou les retraités qui achètent leur tranquilité.

Mais un danger plus grand menace. Un danger qui pourrait bien mettre le feu aux poudres et remettre en cause l'équilibre trouvé du 93. Un danger qui se nomme politique et où, de l'intérieur, des hommes et des femmes sont bien décidés à user de toutes les possibilités pour gagner le pouvoir, quitte à mettre à danger de nombreux citoyens.

Du côté de la forme...

Si Olivier Norek a, aujourd'hui, un peu changé d'univers dans le polar, c'est cette série du capitaine Coste qui l'a fait connaître et qui, peut-être, lui ressemble le plus avec une plongée dans des quartiers de banlieue qu'il connaît fort bien.

Une nouvelle fois, après Code 93, l'auteur nous invite au coeur d'un département que tout le connaît sans jamais vraiment oser y mettre les pieds. L'occasion de le découvrir de l'intérieur et de le comprendre peut-être un peu mieux. L'occasion de mettre des mots sur les attitudes des jeunes notamment et sur cette vie des quartiers qui est tout ce qu'ils connaissent.

Mais si dans le premier opus il s'agissait surtout de découvrir le 93 en tant que tel, l'auteur parvient ici à y intégrer une véritable intrigue, prenante, qui nous prend par la main et nous entraîne de bout en bout avec des révélations et des retournements inattendus de situations parfaites pour la fiction mais aussi terriblement vraies.

Et c'est sans doute parce qu'il y a tant de véracité dans la violence que le lecteur finit par se prendre d'affection pour des jeunes que, hors fiction, il aurait peut-être tendance à juger. Et finalement, l'auteur semble poser la question : la véritable violence est-elle celle que l'on croit ou celle, plus vicieuse, d'hommes et de femmes qui jouent de leur intelligence pour la provoquer ?

Au coeur de tout ça, des crimes vont donc être commis et ce qui aurait pu être un banal règlement de comptes va entraîner Coste dans une enquête beaucoup plus complexe. Le lecteur va donc suivre cette enquête avec ses propres certitudes, des certitudes qui vont être déconstruites peu à peu de manière redoutable par un auteur qui sait jouer avec les nerfs de ses lecteurs.

Olivier Norek est de ces auteurs qui ont su réinventer le style du polar en parlant de choses vraies et non surjouées. De choses qu'il connaît et qui nous impose un autre regard sur le monde qui nous entoure. La violence est dans chaque mot mais nous invite aussi à la bienveillance et à la compréhension de l'inégalité des chances dans notre monde trop étriqué.

En conclusion... 

Voici un roman que j'attendais de pouvoir lire depuis très longtemps et qui m'a beaucoup plus d'autant qu'il a su me ramener aux début d'un auteur qui a su réinventer un genre. Voici un roman d'une rare violence qui porte une dimmension social qui ne peut laisser indifférent. Voici un roman porteur d'une intrigue prenante qui change des polars classiques.
Me reste à lire la troisième enquête de Cose, j'ai hâte ! 

Le zoo - Gin Phillips



Infos sur le livre

éditions : 10-18
date de publication : 06-09-2018
pages : 288
prix : 7,50€

Résumé éditeur

Le zoo est sur le point de fermer ses portes. Joan et son fils de quatre ans, Lincoln, profitent des dernières minutes dans leur coin préféré, à l'écart des visiteurs. Mais quand Joan se décide à pousser gentiment Lincoln vers la sortie, ce qu'elle découvre la force à rebrousser chemin en courant, et à s'enfoncer dans le zoo désormais désert, son fils dans les bras. Dans un parc d'attraction transformé en ménagerie mortelle, pendant les trois plus longues heures de sa vie, Joan va découvrir jusqu'où elle est prête à aller pour sauver Lincoln...

Pourquoi ce livre ?

Dès sa sortie, ce roman m'avait beaucoup tentée et j'avais été ravie de pouvoir me le procurer sans avoir le temps de m'y atteler. Enfin j'ai pu prendre ce temps et je reste mitigée.

De quoi est-il question ?

Pour Joan, toute sa vie tourne autour de son fils de 4 ans, le petit Lincoln dont l'esprit est nourri d'imaginaire. Passionné de tout, l'enfant aime poser des questions pour comprendre le monde qui l'entoure mais ce soir, alors qu'ils s'apprêtent à quitter le zoo où ils ont leurs habitudes, comment Joan va-t-elle pouvoir expliquer à son fils de rester silencieux pour se cacher d'hommes dangereux ?

Car au moment de quitter le zoo, Joan voit sur le côté des corps étendus, des corps assassinés. Une vision d'horreur qui la pousse à aller se cacher. C'est dans l'enclos du porc-épic qu'elle trouvera son salut, l'animal étant mort ils peuvent s'y cacher sans peine. Mais la faim commence à se faire sentir et l'impatience de l'enfant aussi. Comment échapper au danger ?

Durant de longues heures, Joan devra donc tout tenter pour sauver son fils alors que le zoo devient le théâtre d'une scène d'horreur où des hommes semblent bien décider à faire payer. Mais faire payer quoi et à qui ? Pour Joan, le compteur tourne dans un huis-clos étouffant où chaque minute de plus à se cacher est une chance de survivre.

Du côté de la forme...

Les thrillers en huis-clos sont sans doute les thrillers que j'affectionne le plus car ils sont toujours porteurs d'une ambiance particulière. Un huis-clos dans un zoo et prenant en compte une mère et son enfant pouvait donc d'autant plus me plaire.

Le début de ce roman était très prometteur avec un cadre bien pensé et une ambiance déjà très marquée avec le zoo qui s'apprête à fermer et la nuit que l'on imagine commencer à tomber. De quoi faire frémir le lecteur qui s'attend alors à un grand moment de suspens en parfait décalage avec la relation qui unit Joan à son fils.

La relation mère-enfant est d'ailleurs au centre de ce roman et est extrêmement efficace. La mère porte son enfant à bout de bras, dans tous les sens du terme, et ne vit que pour le protéger. Et parce qu'on ne sait pas grand-chose de leur vie en dehors de cette ambiance sombre, cette relation est d'autant plus forte et prenante.

Le zoo est aussi un brillante idée avec des lieux pour se cacher pas toujours sûrs et des animaux qui peuvent, de temps à autres, servir l'intrigue. Pas assez cependant à mon goût car l'auteure m'a semblé passé à côté de rebondissements possibles liés à ce cadre particulier. Ici, le huis-clos perd de son potentiel et c'est dommage.

Et il est vrai que, malheureusement, l'intrigue semble très vite arriver à bout de souffle avec un cadre efficace mais qui peu à peu ne suffit plus au lecteur. L'ambiance se tarrit et l'ensemble perd de sa superbe avec des personnages auxquels on finit par avoir du mal à croire. Et si le final regagne un peu en tensio, il ne suffit pas à rattraper le lecteur.

Côté écriture, l'auteure a su jouer avec les codes du huis-clos et a su nous offrir des personnages différents qui ne semblent exister que dans le cadre de ce roman, ni avant, ni après. Une idée qui aurait pu fonctionne mais qui manque de rebondissements et de tension. Dommage. Quand au thriller lui-même, s'il permet une intrigue prenante peut-être manque-t-il aussi d'un petit quelque chose.

En conclusion... 

Voici un roman qui me faisait énormément envie mais qui, malheureusement, n'a pas su être pour moi à la hauteur des attentes que je pouvais avoir. Si l'idée était bonne et si les personnages savent nous toucher, tout reste peut-être trop artificiel pour avoir su m'embarquer plus que cela. D'ailleurs, j'ai refermé ce roman comme on referme une parenthèse avec un goût d'inachevé.
Je vous invite à vous faire votre propre avis sur ce roman et je ne manquerai pas de lire un autre roman de l'auteure à l'occasion pour me refaire une idée. 

Prêts à tout - Théo Lemattre



Infos sur le livre

éditions : Marivole
date de publication : 10-12-2019
pages : 200
prix : 18€

Résumé éditeur

On a beau courir après l'amour, il se trouve souvent plus près qu'on ne le pense... Pria enchaîne les déceptions amoureuses, et ce, depuis toujours. A chaque fois qu'elle pense avoir trouvé le bon, le sort s'acharne. Pourquoi son nouveau patron, le multimillionnaire Wendall Winslow, intransigeant avec les autres, est-il aussi doux et affectueux avec elle ? Que cache Valentin, son ami d'enfance devenu avocat qu'elle n'a pas revu depuis des années ? Une soirée pour fêter son nouvel emploi, quelques verres et tout peut basculer... En quelques jours, Pria va laisser ressurgir en elle des passions enfouies, des flammes qu'elle croyait éteintes et se laisser dévorer par le passé. Prêts à tout est une comédie romantique pleine de rebondissements, de légèreté et d'amour. Un bon vent de fraîcheur pour cet été!

Pourquoi ce livre ?

Merci aux éditions Marivole grâce auxquelles j'ai pu découvrir ce roman d'un auteur que je suis depuis pas mal de temps sur les réseaux sociaux et dont l'univers me tentait beaucoup.

De quoi est-il question ?

Entre un mère possessive, une succession de déceptions amoureusses et une carrière professionnelle qui ne décolle pas, Pria est une jeune femme au bord du gouffre pour qui chaque jour est pire que le précédent. Même sa dernière amourette vient de se solder par une violente rupture. Heureusement, pour la soutenir, la jeune femme peut compter sur Gabriel, son meilleur ami gay.

Et puis, un jour, le soleil semble enfin frapper à sa porte : Pria retrouve un vieil ami du lycée qui ne laissait à l'époque pas indifférente, l'occasion de commencer enfin une relation stable. Et là-dessus, voilà qu'elle est engagée, sans les compétences requises, dans une grande multinationale en tant qu'assistante de direction. L'occasion de faire ses preuves.

 Ce n'est pas alors sa mère et sa manière de la rabaisser sans cesse qui vont mettre à mal son bonheur d'autant que cette nouvelle vie pourrait bien être aussi le début d'une vraie stabilité et du début de l'indépendance. Pourtant, très vite, Pria va réaliser que quelques chose cloche dans ce bonheur tout neuf, quelque chose qui aurait rapport avec ces relations toutes neuves.

Du côté de la forme...

La chick-lit n'est pas forcément le genre que j'affectionne le plus mais, pour autant, j'aime bien de temps à autres en lire pour m'évader et me plonger dans des univers sans prise de tête. Bon, je l'avoue, ce ne fut gagnant qu'à moitié avec ce roman.

Pria est une jeune femme à laquelle je me suis d'emblée beaucoup attachée. Le coeur sur la main, reine des porte-poisse, elle est de ces personnages dans lesquels il est aisé de se retrouver. Et même si elle nous pourrait très vite un peu gourde et sans caractère, c'est ce qui fait son charme. Jusqu'à un certain point car, au final, Pria m'a littéralement tapé sur les nerfs avec une furieuse envie de la gifler.

Ok, tout semble se lier contre elle et la mère est notamment un personnage qui m'a insupporté. Bien sûr, la romance va s'immiscer pour faire du bien et le travail en or jour de l'ensemble qui fonctionne d'autant qu'un mystère plane autour de tout ce bonheur nouveau, un mystère que le lecteur a très envie de découvrir et qui l'empêche de reposer le roman avant de l'avoir fini.

Pourtant, très vite, Pria est aussi un personnage qui m'a agacée et, sans trop en dévoiler, je dirais que je l'ai trouvée un peu gourde, comme incapable de discernement. Et si on a envie, avec elle, de comprendre le pourquoi du comment de ce qu'elle vit sous nos yeux, on sent venir chaque moment où elle va déraper ce qui finit par être agaçant à souhait.

Mais malgré tout, ce roman est empli de bienveillance et d'apprentissages pour le lecteur. Un apprentissage sur la tolérance et sur la nécessité de grandir, de ce détâcher des carcans. Il sait nous plonger dans des univers professionnels pas toujours idéaux malgré les apparences et il sait aussi nous faire réflechir sur la solitude plus ou moins violente que peuvent vivre ceux qui nous entourent.

Côté style, on retrouve sans mal le style du genre qui se révèle toujours efficace et entre humour et émotion. Je dois cependant dire que j'ai été déroutée par la manière que l'auteur a de donner de sa voix d'auteur de temps à autres en s'adressant directement au lecteur, notamment à la fin. Original et plutôt bien pensé, certes, mais pas le genre d'épilogue que j'apprécie vraiment.

En conclusion... 

Voici un roman qui me tentait beaucoup et qui a été très efficace sur moi. Je pars en effet du principe que si un personnage m'agace autant c'est parce qu'il fonctionne. Je me suis laissée embarquée jusqu'à connaître le fin-mot de l'histoire mais n'ai que moyennement apprécié l'intervention directe de l'auteur. Bref, un ressenti étrange à l'issue de cette lecture.
Je serai cependant ravie, à l'occasion, de découvrir un autre roman de l'auteur. 

mercredi 15 avril 2020

La vallée du lotus rose - Kate McAlistair



 Infos sur le livre

éditions : L'Archipel
date de publication : 03-10-2018
pages : 679
prix : 24€

Résumé éditeur

Une jeune aristocrate anglaise découvre l'Inde au temps des colonies : un roman d'amour et d'aventures, plein de rebondissements. Passions en terres d'Asie 1918. À 16 ans, Jezebel Tyler, orpheline issue de l'aristocratie anglaise, part aux Indes rejoindre son tuteur, un archéologue de renom. Ce dernier compte la marier au baron von Rosenheim, qui financera en échange ses recherches liées à une cité disparue.À bord du luxueux paquebot qui la mène à Calcutta, Jezebel se lie avec Olga Obolenski, duchesse russe fantasque, qui lui enseigne les usages du monde, tout en l'encourageant à prendre en main sa destinée. Durant la traversée, elle fait aussi connaissance de Jan Lukas, un aventurier dont le charme la subjugue.Au Bengale, elle découvre, prise au piège, que son futur époux est un trafiquant d'opium notoire, au caractère tyrannique. Et malgré la délicatesse du prince Charu, qui la courtise, elle ne parvient pas à oublier Jan...Des jardins de Darjeeling aux mangroves des Sundarbans, ce premier volume de la trilogie du Lotus rose met en scène une héroïne attachante, déterminée à échapper au carcan de son éducation pour vivre sa vie.

Pourquoi ce livre ?

Depuis sa sortie, ce roman me tentait énormément. Sa parution, pour une somme plus raisonnable, chez France Loisirs a été l'occasion de me le procurer et j'ai enfin pu prendre le temps de le lire.

De quoi est-il question ?

Jezebel est une jeune orpheline anglaise laissée depuis la mort de ses parents dans un prestigieux internat anglais où elle a su apprendre à devenir une femme du monde. Une femme, certes, mais une femme avec sa propre réflexion et une relative liberté. Alors, lorsque son parrain vivant en Inde l'invite à le rejoindre pour la marier, la jeune fille est désespérée.

N'ayant guère le choix, elle s'embarque sur un navire où elle fera la connaissance d'une jeune aristocrate russe qui la prendra sous son aile et lui apprendre à devenir une femme plus indépendante et plus forte que la fillette trop gâtée qu'elle est encore. L'occasion pour Jezebel de découvrir les premiers émois en apprenant à écouter son coeur.

Une nouvelle vie s'offre à la jeune fille mais arrivée à Inde, Jezebel est plongée au coeur d'un univers très masculin et violent. Un monde de traffics et de secrets lié à un étrange collier pour lequel certains seraient prêts à tuer et qui pose bien des questions à la jeune femme qui va tout tenter pour décrocher la vie qu'elle souhaite.

Du côté de la forme...

Cela faisait longtemps que ce roman me titillait sans que je n'ai jamais l'occasion de préoccuper, la brique étant un peu là ! Et si l'intrigue me tentait, je savais que je me devrais de le lire à tête reposée pour l'apprécier et j'ai eu raison.

S'il est une chose à évoquer en priorité c'est en effet la densité assez exceptionnelle de se roman qui, pourtant, est un premier tome. L'occasion pour l'autrice de développer ses personnages et son cadre historique de manière tout à fait complète ce qui nous donne vraiment le sentiment de connaître les personnages comme étant de "vraies" personnes.

Nous sommes en début de siècle dernier et l'autrice prend le temps de nous conter dans ce cadre toujours prenant l'émancipation d'une femme. Car avec ce roman, elle sert l'émancipation des jeunes filles tout en nous offrant un panorama de la bonne société anglaise mais ce de manière décalée puisque, dès le départ, l'héroïne part pour un voyage aux Indes.

Les romans se déroulant dans ce cadre sont bien rares ce qui laisse libre court ici à l'autrice pour nous offrir un décors parfois proche du document avec un contexte historique fouillé et un imaginaire bien développé dans une nature luxuriante qui change de ce dont on à l'habitude. Un imaginaire agaçant aussi avec des moeurs et des traditions masculines qui agacent d'autant qu'on les sait réelles.

Car ce roman est aussi une intrigue finement développée avec une jeune fille qui va se trouver malgré elle au coeur de traffics dérangeants où tous les coups sont permis pour l'appât du gain et du pouvoir alors même que l'amour pur tente de se frayer un chemin. Pour autant, peut-être ce roman est-il presque trop développé au risque, parfois, de perdre un peu le lecteur dans un univers trop complexe.

Côté style, j'ai beaucoup aimé le travail de recherche qui ressort à chaque page pour nourrir une intrigue qui fonctionne et une héroïne attachante. Les rebondissements sont nombreux et ce roman offre une vision globale d'une époque même si, parfois, j'avoue avoir un peu décroché dans un trop plein de détails qui m'ont fait perdre le fil de l'histoire. 

En conclusion... 

Voici un roman qui m'a offert un grand moment de lecture sur une époque que j'affectionne beaucoup et sur une héroïne étonnante. Voici un roman qui nous plonge dans un autre et dans un voyage à l'autre bout du monde mais qu'il convient de lire à tête reposée car la force du détail et de l'univers peut aussi potentiellement perturber la lecture. 
J'ai toutefois passé un très bon moment avec ce roman dont je lirai sans hésiter la suite quand je le pourrai. 

lundi 13 avril 2020

Je, François Villon - Jean Teulé

 

Infos sur le livre

éditions : Julliard
date de publication : 02-03-2006
pages : 420
prix : 20,50€

Résumé éditeur

Il est peut-être né le jour de la mort de Jeanne d'Arc. On a pendu son père et supplicié sa mère. Il a appris le grec et le latin à l'université de Paris. Il a joui, menti, volé dès son plus jeune âge. Il a fréquenté les miséreux et les nantis, les étudiants, les curés, les prostituées, les assassins, les poètes et les rois. Aucun sentiment humain ne lui était étranger. Des plus sublimes aux plus atroces, il a commis tous les actes qu'un homme peut commettre. Il a traversé comme un météore trente années de l'histoire de son temps et a disparu un matin sur la route d'Orléans. Il a donné au monde des poèmes puissants et mystérieux et ouvert cette voie somptueuse qu'emprunteront à sa suite tous les autres poètes : l'absolue liberté.

Pourquoi ce livre ?

C'est après avoir reparlé de ce roman avec une coupine de fac (Camille si tu passes par là...) que j'ai enfin décidé de le sortir de ma pal où il m'attendait depuis longtemps.

De quoi est-il question ?

Il naît à Paris, au XVème siècle. Orphelin, il aurait pu devenir un grand homme de science ou de savoir. Il nous a d'ailleurs laissé l'une des plus grandes oeuvres poétiques de son temps. Mais n'ayant connu ni père ni père, que le carcan des règles religieuses, il décide de le plus jeune âge de s'en libérer en se faisant voleur, menteur, bandit et contre toute règle.

Cet homme, c'est François Villon. Plus à l'aise avec les mauvais garçons et les prostituées qu'avec les clercs et les étudiants de la Sorbonne, il passe sa jeunesse à courir les rues de Paris et à se réjouir de sa mauvaise image. Le fait même d'aller en prison et de risquer la mort ne suffiront pas à l'assagir et toujours il restera du mauvais côté de la barrière.

Pour autant, ses habitudes et ses rencontres, il ne les laissera pas inconnues. Car dès qu'il saura écrire, le jeune Villon se délectera de l'écriture, en langue vulgaire bien sûr, pour parler du vrai Paris, de celui que les savants refusent. Ainsi, plutôt que de parler de la bonne société, il préférera parler de la Grosse Margot et se plaindre de sa pauvre condition d'étudiant...

Du côté de la forme...

Jean Teulé fait partie de ces écrivains grand public qui ont su vulgariser l'histoire et qui savent faire connaître des sujets méconnus au plus grand nombre. Et son roman sur Villon est de ceux-là pour faire découvrir à des lecteurs non spécialistes la vie de cet homme hors du commun.

J'ai eu l'immense chance de pouvoir étudier l'oeuvre de Villon alors que j'étais à la fac et c'est donc en parfaite connaissance de cause que je me suis plongée dans ce roman qui se veut une biographie mais, sans cachoterie de la part de l'auteur, une biographie arrangée pour le bien de la fiction. Une chose qu'il convient de savoir pour ne pas commettre d'impair.

Dans ce roman, l'auteur s'attache donc à présenter Villon comme un orphelin confiés aux soins d'une éducation prestigieuse dont il n'aura que faire. Une belle manière de montrer un adolescent intemporel, un adolescent qui décide de mener sa propre vie contre l'avis de tous. En cela, Villon devient attachant même si, à de nombreuses reprises, il mériterait bien une gifle ou deux.

Mais l'auteur nous montre dans ce roman l'âme d'un poète et d'ailleurs un poète dont la vie rime étroitement avec son oeuvre ce que Teulé s'emploie à merveille à démontrer en présenter les poèmes les plus connus de l'homme en fonction de son vécu. Et  si nous n'en savons en vérité rien, le procédé est efficace et donne portrait d'un autre temps.

Car ce qui est troublant dans ce roman c'est le tableau de Paris qui se dresse devant nous, un Paris loin d'être idyllique qui présente sans vergogne la misère et la maladie. Pour autant, le tableau se présente aussi comme une image du Paris jouissif où l'amusement se dresse au-delà de la pauvreté ce qui a des échos très actuels.

Le style de Jean Teulé est un style sans chichi où l'historique se mêle à son imaginaire. Il ne s'en cache pas et invite chaque lecteur à se faire son opinion sur ce qu'il conte. Et s'il tente de s'approcher du réel, c'est sa capacité à l'imaginaire qui rend sa biographie unique. Car en mêlant faits historique et fiction, il nous offre un personnage à part entière qui sait nous faire rire et pleurer, parfois malgré lui.

En conclusion... 

Voici un roman que j'attendais de pouvoir lire depuis longtemps mais pour lequel je ne trouvais jamais le bon moment. Voici un roman qui joue sur la biographie d'un poète à la fois connu des amateurs et méconnu à notre époque ce qui est dommage. Ce roman est alors à la fois un joli moyen d'amuser les lecteurs avertis et d'initier les autres à un poète étonnant.
Jean Teulé est de ces auteurs que je suis et espère vivement pouvoir bientôt lire un autre de ses romans. 

Le petit chaperon rouge - Sonia Alain



Infos sur le livre

éditions : ADA
date de publication : 11-06-2018
pages : 204
prix : 10€

Résumé éditeur

Dans cette version contemporaine du Petit Chaperon rouge, la candeur est bafouée et les fantasmes deviennent cauchemars. Après cette lecture interdite, les bois ne vous sembleront peut-être plus aussi sûrs... Une vieille Tsigane en communication avec des esprits, condamnée à une fin tragique pour avoir découvert la vérité au sujet de sa fille. Une enfant retrouvée dans les bois, devenue plus tard une séductrice avide de vengeance. Un groupe d'hommes aux moeurs vicieuses, semant l'horreur sur leur passage. Un sergent de police acharné, tentant d'endiguer une série de meurtres barbares à caractère sexuel. Un loup rôdant dans la nuit, à la recherche d'une proie délectable.

Pourquoi ce livre ? 

Etant une grande fan de la collection des "Contes interdits", cela faisait un moment que j'avais envie de découvrir ce titre d'une auteure que j'avais envie de lire depuis longtemps.

De quoi est-il question ?

Alors qu'elle n'est qu'un bébé, Angelika est confiée à la garde de sa grand-mère, une vieille tzigane vivant au coeur de la forêt. Sa mère vient d'être assassinée par un groupe obscure d'hommes aux moeurs étranges et odieuses. Dès lors, Malicia n'a d'autre but que de protéger sa petite fille mais neuf ans plus tard elle est elle aussi assassinée.

La fillette s'étant enfuie dans la forêt, elle est retrouvée par un couple de promeneurs et menée à un foyer. Mais Angelika demeure amnésique sur son passé, elle a tout oublié de l'horreur qu'elle a vécu dans les bois. Une amnésie qui arrange bien les hommes du groupe, des hommes qui voudraient bien rallier Angelika à leur cause.

Mais devenue jeune femme, Angelika a décidé de se venger et de venger les femmes de sa famille en détruisant un à un tous les hommes du groupe. C'est alors qu'Olivier, un enquêteur s'intéressant de près à ces hommes découvre que leur secte cache de redoutables criminels, des criminels que quelqu'un semble vouloir éliminer...

Du côté de la forme...

Sonia Alain fait partie des autrices québécoises que j'avais envie de découvrir depuis pas mal de temps et même si ce roman est en-dehors de son univers de base, je suis plutôt contente d'avoir commencé par celui-ci.

Une fois encore, il convient de préciser que le rapport entre le conte d'origine et le conte revisité est plutôt lointain. Pour autant, on retrouve tout de même les différents personnages principaux du conte et même une partie de leur caractère que ce soit l'insouciance du chaperon, la naïveté de la grand-mère ou la brutalité du loup.

Nous retrouvons dans cette opus toute la violence qui caractérise la série avec des meurtres et des viols, des moeurs déplacées et des psychologies très dérangeantes. Et si cela se ressent moins ici, tout est suggéré jusqu'à l'assouvissement de la vengeance. Une manière d'amener l'horreur de manière plus dure et plus inattendue.

Malheureusement, au-delà de ce cadre très prenant et de la tradition tzigane que l'autrice parvient fort bien à décrire et à mettre au goût de son roman, j'ai eu du mal à m'attacher au personnage d'Angelika. Car bien que comprenant son désir de vengeance, elle n'a pas su me toucher comme si elle restait hors de moi comme hors d'elle-même.

Côté polar, nous avons un enquêteur et une intrigue menée tant pour retrouver la meurtrière que pour comprendre les horreurs commises par le groupe d'hommes mais peut-être ce côté aurait-il pu être davantage développé. En effet, il m'a semblé ici être dans une aisance liée à l'aspect court du roman mais qui aurait mérité plus.

L'autrice sait par son écriture nous entraîner dans son histoire et de son style ressort sa passion pour l'histoire et les légendes. On sent dans ce roman un genre différent de ce dont elle a l'habitude et duquel elle se sort plutôt bien même si le côté "court" ne semble pas lui convenir. En effet, on sent dans ce roman de multiples possibilités inexploitées par une rigueur de "signes". Dommage.

En conclusion... 

Cela faisait un moment que j'avais envie de découvrir ce roman et je suis plutôt contente d'avoir enfin pu le lire même s'il semble que l'autrice aurait pu aller plus loin. Toutefois, elle a su me donner envie de m'interroger davantage sur les traditions tziganes et de découvrir d'autres de ses romans plus dans "son style".  
Une autrice découverte et un nouveau titre de la collection lu, appréciable. 

Notre-Dame de Paris - Victor Hugo

 
1831

Résumé succint

Paris, 1482. Autour de la belle bohémienne Esmeralda, dont la danse résonne sur le parvis de Notre-Dame, gravitent trois prétendants prêts à tout pour la conquérir : Phoebus, noble capitaine, Claude Frollo, prêtre sans foi, et le célèbre Quasimodo, bossu au grand coeur... Surplombant le roman, la cathédrale, vivifiante Babel, lieu de refuge et d'épouvante aussi, voit se presser autour d'elle le peuple, acteur de l'Histoire en marche.  

Un roman historique

Ecrit en 1831, ce roman développe une intrigue se déroulant près de quatre siècle plus tôt dans un Paris bien différent du contemporain de l'auteur, et a fortiori, du nôtre. Ainsi, alors que le monde connaît les premières évolutions techniques notoires, les lecteurs développent une passion pour le temps passé et notamment pour l'époque médiévale. Une époque qui reste dans l'esprit de tous une époque charnière, une époque où les romans de chevalerie et les histoires de princes et de princesses ont la part belle. Semblerait-il que cela soit toujours le cas aujourd'hui...

Ainsi, l'auteur prend le temps d'entraîner son lecteur dans une autre époque aux moeurs et coutumes bien différentes, et surtout Paris. A l'heure où l'éducation est encore loin d'être à l'accès de tous, l'auteur invite donc les lecteurs à un savoir plus étendu sur la construction de Paris et notamment de Notre-Dame qui, dans l'imaginaire collectif, est déjà à l'époque un bâtiment qui recèle de secrets et de mystères. Ces secrets, Hugo en offre ici un tableau, désormais dans l'imaginaire de tous.

De fait, ce roman se présente à la fois comme un roman éducatif sur une époque et sur d'autres moeurs tout en offrant une fiction efficace et intemporelle.

L'amour dans tous ses états

L'amour, la romance, les sentiments humains... Quoi de plus intemporel en littérature ? Et ce roman en est une fois encore la preuve parfaite avec la personnification de l'amour en ce personnage d'Esmeralda qui est aimée à tous les niveaux, trop aimée sans doute même. Car tout tourne autour d'elle et des sentiments de la gente masculine à son égard.

Il y a tout d'abord l'amour courtois. Détourné cela dit par Phoebus qui, s'il a éprouvé une certaine tendresse pour la bohémienne à un instant du roman n'agit pas autrement que comme un garçon aisé de son temps : égoïste, sans morale et ne faisant croire à son amour pour Esmeralda que dans le but de se "divertir" avant d'entreprendre son véritable mariage. A mon sens, Phoebus est donc bien le plus bel enfoiré du roman d'autant que, après la fin, il poursuivra sa vie comme si de rien n'était.

L'amour fou est bien sûr représenté par l'archidiacre Frollo qui a bien souvent été représenté comme l'antagoniste principal. Si le prêtre est loin d'être irréprochable, il représente à mon sens la folie que peut engendrer l'amour. D'ailleurs, il est le seul homme du roman à se livrer si expressément à Esmeralda, au risque de perdre tout ce qu'il a. Il s'y prend comme un manche certes, mais à sa manière son amour est sincère.

Bien souvent, il a été dit que l'amour sincère justement était représenté par Quasimodo, celui qui va, à la fin du roman, aller se laisser mourir auprès de sa belle comme si, sans elle, il n'avait plus de raison de vivre. Mais si son amour est sincère sur bien des points il ne l'est pas au sens le plus stricte. Ce point de vue est personnel mais, à mon sens, l'amour de Quasimodo pour Esmeralda est plutôt celui d'un enfant pour sa mère. Cet amour se déployant lorsque la jeune fille lui donne à boire.

Finalement, le seul qui paraît aimer Esmeralda pour ce qu'elle est et dans un profond respect est sans doute Gringoire, le poète, celui qu'elle épousera pour le sauver de la mort. Cet amour sera fraternel et Gringoire sera le seul homme du roman dont Esmeralda n'aura jamais peur. Car même le roi de la cour des miracles semble susciter chez elle la crainte.

 La famille déchirée

Les seules relations qui semblent alors être sincères entre les personnages sont les relations qui s'apparentent aux relations familiales.

Frollo adopte Quasimodo comme, plus jeune, il a pris en charge son jeune frère Jehan. A bien des égards il est donc un père et un père, sinon idéal, au moins en adéquation avec son temps et sincère dans l'amour qu'il porte aux siens.

Mais surtout, il convient de parler de la Recluse, ce personnages oublié dans les multiples adaptations, celle qui se révèlera être la mère d'Esmeralda. Une femme détruite par la perte de son enfant dont la folie transpire à chaque page mais qui nous émeut aux larmes dans son grand final lorsqu'elle retrouve sa fille. Une belle image de l'amour maternel qui tranche avec la brutalité de l'ensemble du roman.

Pourtant, l'amour des parents pour leurs enfants ne suffira jamais et c'est bien l'amour fraternel qui gagne. Gringoire comme déjà évoqué et, de manière plus délicate, l'amour qui unira jusqu'au bout Esmeralda et sa chèvre.

L'onirisme perpétué 

Notre-Dame de Paris fait partie de ces romans porteurs d'un véritable imaginaire collectif pour lesquels on oublie parfois qu'ils ne sont que des romans. Car comment aller visiter Notre-Dame sans imaginer Quasimodo du haut d'une tour. 

Si la cathédrale est célèbre dans le monde entier, c'est non seulement pour son architecture fabuleuse mais aussi pour cette fiction si habilement développée qu'on pourrait la croire vraie. Et d'ailleurs, il n'y a qu'à voir le nombre d'adaptations diverses et variées qui fleurissent encore aujourd'hui pour s'en rendre compte.

Le style Hugo 

Le style Hugo, c'est un style qui sait mêler fiction et description. Durant des pages il nous contera la construction de la cathédrale ou le décors de Paris à l'époque avant de nous faire basuler dans l'histoire pour nous conter l'adoption de Quasimodo ou la découverte de la Recluse. Un travail d'orfèvre parfois arrassant mais magistral.

Chaque mot est pesé avec minutie et la poésie est présente à chaque page non sans imposer au lecteur une réflexion politique sur son temps, une réflexion aussi sur les esprits étriqués et sur le mal que peuvent faire aussi des pensées avec des oeillères.


Notre-Dame de Paris est, vous l'aurez compris, l'un de mes classiques favoris