vendredi 25 janvier 2019

Sale temps pour les allemands - Christine Schneider



Infos sur le livre

éditions : Lucien Souny
date de publication : 18-01-2019
pages : 214
prix : 18,50€

Résumé éditeur

C'est d'une histoire peu glorieuse, longtemps passée sous silence des deux côtés du Rhin, que témoigne ici Werner Schneider, sous la plume de sa fille, Christine. " [...] ce livre donne également une consistance personnelle à une lacune historiographique qui est celle du sort des prisonniers de guerre allemands (PGA) en France ", précise Beate Klarsfeld dans sa préface. Werner Schneider fait partie de ces 750 000 PGA envoyés en France, dès avril 1944, pour reconstruire le pays que leur armée avait détruit. Détenus dans les terribles camps de la plaine du Rhin, dans des conditions inhumaines, affamés, affectés au déminage des régions côtières, aux travaux industriels ou agricoles, ils ne furent pas traités comme l'exigeaient les conventions de Genève. Si tous feront l'amère expérience de la défaite et connaîtront le processus de dénazification, tous ne sont pas des criminels de guerre. Le voile sur cette sombre page se lève petit à petit. " Nous n'avons jamais cessé de lutter contre l'impunité des criminels nazis, mais nous n'avons jamais demandé ou accepté que l'on persécutât des Allemands parce qu'ils étaient allemands ", a déclaré Serge Klarsfeld le 25 mai 2018 lors de l'inauguration d'une stèle au camp de Rivesaltes où furent détenus des PGA. Un récit remarquable, ponctué de références historiques, écrit en toute humanité. Un témoignage de première main pour que " chacun puisse se forger une opinion personnelle de ce qui s'est alors passé, car l'Histoire n'est pas seulement celle des vainqueurs ", comme l'écrit Werner Schneider. 

Pourquoi ce livre ?

C'est en entendant l'éditrice parler de cet ouvrage que j'ai eu envie de me précipiter à la librairie la plus proche et de me lancer immédiatement dans cette lecture.

De quoi est-il question ?

Werner Schneider n'est qu'un tout jeune homme lorsque, après avoir été membre des jeunesses hitleriennes, il est envoyé dans le nord de la France pour poursuivre un cursus militaire qu'il n'a pas demandé. Commence alors pour lui de longs mois loin de sa famille, des mois durant lesquels il doit se préparer au pilotage d'avions, à des batailles en prévision.

Mais 1945 sonne la fin des conflits. A l'heure où les camps sont libérés et où la France tente de se relever,  Warner est, comme la majorité de ses compagnons, fait prisonnier de guerre dans des conditions terribles : sans eau ni nourriture, dans un froid glaciale et dans des conditions d'hygiène déplorables, ces hommes deviennent esclaves pour rebâtir la France.

Durant deux ans, l'homme sera traité pire qu'un animal et devra se battre pour survivre dans un pays bien décidé à faire payer l'ancien ennemi, oubliant que tous les allemands ne furent pas SS. Pour la première fois, c'est à travers la plume de sa fille que Werner Schneider fait entendre sa voix sur un pan honteux et oublié de notre histoire.

Du côté de la forme...

Il y a les livres que vous lisez pour vous faire plaisir et il y a ceux que vous vous sentez le devoir de lire parce qu'il s'agit de titres importants nécessitant une mise en évidence notable. Avant même de débuter ce roman, on comprends de quelle catégorie il fait partie et combien il est essentiel.

Il n'est pas si simple de classer cet ouvrage dans une catégorie particulière. Car s'il s'agit d'un document, il s'agit aussi d'une histoire vraie, d'un témoignage proposé par une voix interposée. Ainsi, le caractère universel et objectif du récit se mêle à l'émotion d'une fille pour son père ce qui apporte une touche très forte à cet ouvrage terrible.

Terrible car il remet en cause beaucoup de choses et notamment le rapport aux prisonniers de guerre, le rapport au comportement des vainqueurs vis-à-vis des vaincus. Car dans cette histoire, les Alliés n'ont pas le beau rôle, loin de là. Au nom d'un amalgame entre soldats allemands et nazis, l'horreur absolue leur a été faite endurer, de quoi remettre les choses à plat sur notre histoire.

Prendre conscience que notre histoire a ses zones d'ombres n'est pas facile. Pas facile mais essentiel pour comprendre et, surtout, pour ne jamais oublier. Et à travers l'histoire de Werner, c'est une histoire qui fait mal que nous découvrons parce que l'histoire d'un jeune homme qui n'avait rien demandé et qui pourtant va vivre l'enfer.

En outre, le caractère témoignage se mêle à la documentation avec le récit vrai d'un homme que l'on va suivre et, en fin d'ouvrage, des notes relatives à des articles de lois et des données plus historiques à mettre en parallèle (au choix) avec le récit en cours. Un document où se mêle de fait une émotion certaine et forte qui n'est pas sans faire réfléchir.

Car ce qui frappe tout au long de ce récit, c'est l'incompréhension sur ce qui arrive, les regrets et surtout les souvenirs qui permettent de survivre. Et l'incompréhension de Werner se mêle à celle de sa fille qui raconte, se propageant ainsi jusqu'au lecteur qui peut se trouver déranger et peut avoir envie d'occulter cette vérité qu'il n'oubliera pourtant plus.

En conclusion... 

Même s'il est toujours agréable de parler d'ouvrages qui font du bien, il est aussi important parfois de parler de ceux qui vous perturbent, vous font réfléchir et remettent en cause vos perspectives sur ce que vous croyez savoir. C'est le cas de l'histoire de Werner Schneider qui nous laisse entrevoir un pan terrible de notre histoire dont il faut avoir conscience et ne jamais oublier.
Ce texte est dérangeant pour la bonne cause, saura attiser les mémoires et les critiques tout en offrant un récit de vie qui ne peut laisser insensible. 

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